Transmettre Notcimik, s’ancrer dans le Nitaskinan

L’univers des sites sur le territoire Atikamekw Nehirowisiw

Nitaskinan, Québec (Canada)

Étienne Levac

Sous la codirection de Laurent Jérôme et Anne-Marie Colpron, Étienne réalise une maîtrise en sciences des religions avec une concentration en études féministes à l’Université du Québec à Montréal.

“Le territoire ancestral atikamekw nehirowisiw, le Nitaskinan, est situé au centre du Québec et fait une superficie de 80 000 km2. Au fil de mes séjours dans la communauté de Manawan, mon intérêt pour les questions territoriales n’a fait que s’accroître. Avec un bagage en science politique, les questions de dépossession territoriale et de résurgence autochtone ont été le terreau de mon projet de maîtrise portant sur les responsabilités des Atikamekw Nehirowisiwok envers le territoire. Ce regroupement de photos aborde différentes dimensions de l’univers forestier que les Atikamekw Nehirowisiwok ont bien voulu me partager.” - Étienne Levac

Namekus

Au courant de l’année, chaque saison est l’occasion de pratiquer différentes activités dans le territoire. Au sein des six saisons atikamekw, chaque mois corresponds à une activité. Le mois d’octobre est nommé en nehiromowin, Namekusi Pisimw, le mois de la truite grise. Ce poisson occupe une place très importante dans la cosmologie atikamekw. Comme certaines pourvoiries ensemencent des lacs avec des truites allogènes du Nitaskinan, chaque lac où Namekus fraye est important.
Prise le 28 octobre 2021 et le 7 juillet 2021

Avec les siècles de colonisation et de dépossession territoriale qui perdure aujourd’hui, le territoire est un espace de guérison. En effet, la résurgence des savoirs et des pratiques atikamekw se déroule beaucoup en territoire. Près de la communauté de Manawan, le site mirerimowin (qui signifie sérénité/bien-être) a été développé afin de permettre la guérison et le mieux-être communautaire. Le lieu est également utilisé pour des activités de transmission avec les écoles primaire et secondaire.

Prises le 8 octobre 2021, le 20 octobre 2021

La dépossession territoriale à travers la coupe forestière abusive et le non-respect de l’autorité des chefs de territoire mène à des réactions des familles atikamekw afin de protéger leur territoire. Cette photo a été prise dans les premiers jours du blocage du km60 par la famille Dubé afin de bloquer l’entrée des machineries dans leur territoire à la suite du saccage de deux érablières.

Prise le 18 mars 2022

Le territoire est également un lieu de mémoire de l’occupation territoriale des Atikamekw Nehirowisiwok. Les familles atikamekw se déplaçaient constamment dans leur territoire afin de ne pas puiser toutes les ressources d’un même endroit. Ainsi, sur le bord des chemins forestiers, on peut parfois croiser des sites de campements temporaires (Matakan) utilisés par les familles. Sur le site touristique Matakan, on peut d’ailleurs voir sur les arbres l’utilisation du site pour le travail de l’écorce. Bien que les sites de campements ne soient plus autant utilisés qu’avant, les atikamekw nehirowisiwok occupent toujours le territoire et y exercent leur activité dans leur camp familial.

Prises le 28 octobre 2021, le 20 octobre 2021 et le 6 octobre 2022.

Notcimik qui se traduit par forêt, mais signifie littéralement « là d’où je viens », est un espace de valorisation identitaire pour les atikamekw nehirowisiwok. L’une des dimensions de cette valorisation identitaire, notamment dans le cadre du projet de transmission culturelle, le Projet Matakan passe par la transmission de la tradition orale. Le territoire est marqué des récits de la tradition orale atikamekw. La photo a été prise lors d’une sortie de documentation avec une aînée et deux jeunes atikamekw sur le lieu d’un de ces récits.

Prise le 4 août 2021

“Lors de mes séjours terrain à Manawan, j’avais l’habitude d’aller rendre visite à Armand Echaquan pour l’aider avec différentes tâches et converser avec lui. Ce cliché a été pris après une sortie à son camp pour déneiger le toit de son carré de tente. C’est aussi la dernière fois que j’ai vu mon ami qui est décédé le 12 mars 2022 à 80 ans, soit 16 jours après cette sortie. “ - Étienne

Prise le 24 février 2022